Le partenariat patient : porteur de santé et de démocratie

15.06.2022  -  
Jean-Luc Bernier

Le partenariat entre les patientes, les patients, et l’équipe soignante est producteur de santé. Il est également, et peut-être de façon plus importante, producteur de démocratie et de justice.

Attablés devant un parterre de participants de l’École d’été en Gestion des services de santé en contexte franco-Québécois, des panélistes d’expériences et d’expertises variées ont exprimé à tour de rôle l’urgence d’opérer une transformation des pratiques au sein des établissements de santé et services sociaux. Au centre de cette transformation se trouve le questionnement concernant les rôles que peuvent jouer les citoyens, les patients, bref les individus qui ont ou auront besoin des soins ou des services. 

En d’autres mots, nous toutes et tous.  

Quel est notre rôle face au système de santé, face à notre propre santé et nos trajectoires de soins? Surtout, quels rôles les intervenants du système de santé sont-ils prêts à nous laisser jouer et quels outils ont-ils à leur disposition pour nous intégrer? 

« Les établissements du Québec opèrent à pleine capacité. L’offre clinique, organisationnelle et administrative est optimisée à tous les niveaux. Et pourtant, la demande pour les services est grandissante et de plus en plus exigeante sur les équipes. Des solutions d’amélioration doivent donc être trouvées ailleurs et le partenariat patient peut diminuer ce fardeau de façon extraordinaire », a analysé en marge de l’École d’été Vincent Dumez, patient-partenaire et directeur des partenariats communautaires de la Faculté de médecine, Université de Montréal. 

« Impliquer les patients dans le système de santé, dans leurs soins, ça marche déjà et on constate les bénéfices pour tout le monde », a renchérit Mathieu Jackson, patient-partenaire et responsable de l’École du partenariat du Centre d’excellence sur le partenariat avec les patients et le public. 

À coups d’exemples de modèles de partenariat patient déjà en place, de projet pilotes à succès ou encore d’outils d’aide à la décision déjà disponibles, les panélistes ont exposé l’auditoire aux avantages du partenariat-patient. Résumons-les simplement ainsi: une meilleure compréhension qui conduit à un meilleur suivi du traitement, une meilleure santé de l’individu, une efficience augmentée de l’équipe soignante et une meilleure utilisation des ressources. 

Pourquoi le partenariat patient n’est-il pas intégré largement dans les pratiques? 

L’intégration des bonnes pratiques en est encore à ses balbutiements au Québec. Aussi, de nombreuses craintes persistent au sein des équipes administratives et cliniques quant à la perspective d’intégrer des patientes et des patients dans la prise de décision. Le manque d’encadrement dans les processus, le flou créé entre le rôle de soignant et de soigné ou encore la question de la rémunération font partie des questionnements qui peuvent bloquer l’adoption de cette pratique. 

Heureusement, des bonnes pratiques continuent d’émerger et d’être communiquées en continue. Celles-ci sont révélées par des projets de recherche effectués au Québec et ailleurs dans le monde en plus d’être offertes dans le cadre de formations. Le Québec serait même à l’avant-garde dans le développement de modèles de partenariat patient alors que de nombreuses organisations y travaillent activement à différents niveaux. « Vous avez une vraie mine d’or entre les mains, à la fois avec le potentiel du partenariat patient, et la connaissance scientifique et pratique pour la mettre en place et la soutenir », s’est empressée de dire Alice Casagrande, patiente partenaire et membre du comité de pilotage du mouvement Associons nos savoirs. Parmi ces organisations, mentionnons notamment: 

« L’intégration d’usagers-ressources dans la structure organisationnelle contribue à la mise en valeur du savoir expérientiel ainsi qu’au développement d’une culture de partenariat et d’une co-construction avec les usagers, a partagé Valérie Langlois de l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec- Université Laval aux participants de l’École d’été. Un usager impliqué activement dans ses soins ou services, pouvant partager ses préoccupations et son savoir expérientiel, notamment en lien avec la vie avec sa maladie, conduit à une meilleure autoprise en charge de sa santé et à une expérience de soins beaucoup mieux adaptée à ses besoins réels et à son projet de vie ».  

Également parmi les panélistes, Dre France Légaré a poussé la réflexion encore plus loin. « Se pourrait-il que l’acte conscient et structuré d’impliquer la patiente ou le patient dans les décisions contribue à son éducation et à celle des équipes cliniques? Se pourrait-il que cet échange de savoirs soit une sorte de transfert de pouvoir? Selon moi, cet acte n’est rien de moins qu’une contribution directe à la démocratie, un acte de justice qui donne du sens à mon travail de clinicienne ». 

L’École d’été en Gestion des services de santé en contexte franco-Québécois a lieu du 6 au 10 juin 2022 à l’Université Laval. Pour plus d’information : https://www4.fsa.ulaval.ca/etudes/ecoles-dete/gestion-des-services-de-sante/ 

 

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