Le Saint-Laurent, un médicament? C’est ce à quoi il a été comparé lors d’un récent panel organisé par la Chaire de recherche Littoral de l’Université Laval. Et si, pour que votre corps et votre tête aillent mieux, il vous suffisait d’aller marcher sur la berge quelques fois par semaine?
L’odeur iodée du varech. Les cris mélancoliques des mouettes. Le murmure des vagues qui s’échouent sur les rochers. Le vent qui vous fouette le visage. Comment ne pas ressentir un apaisement immédiat quand on s’immerge dans ce genre d’environnement?
Ce n’est plus un secret : la nature a de réels bienfaits sur la santé, autant physique que mentale. Être à son contact au moins 2 heures par semaine fait diminuer la tension artérielle, le taux de cortisol (l’hormone du stress), la fréquence cardiaque et l’anxiété. C’est pourquoi les médecins donnent de plus en plus de prescriptions vertes, où ils recommandent à leurs patients de passer, par exemple, 4 fois 30 minutes dans un parc ou une forêt chaque semaine.
Des prescriptions bleues pour la santé des écosystèmes et des humains
Après avoir assisté au panel « Saint-Laurent et santé – Tisser des liens et imaginer des priorités d’action », tenu le 15 juin dernier, on peut aisément imaginer que les prescriptions bleues, nous invitant à côtoyer le Saint-Laurent, un lac ou une rivière, seront bientôt aussi populaires, puisque les bienfaits sont similaires.
Organisée par la Chaire de recherche Littoral, cette discussion a été l’occasion de se pencher sur les liens entre le Saint-Laurent, la santé, le bien-être et le développement durable de nos communautés, ainsi que sur l’apport précieux des peuples autochtones dans les connaissances liées à ces sujets. Animée par la chercheuse en santé environnementale Dr Tiff-Annie Kenny, l’événement réunissait la Dre Claudel Pétrin Desrosiers, présidente de l’Association québécoise des médecins pour l’environnement, Quentin Condo, rappeur et activiste mi’kmaq, et Dany Dumont, directeur du Réseau Québec maritime.
Chacun y est allé de recommandations pour inciter les gens à s’approprier les environnements maritimes, à les protéger, ainsi que leurs bénéfices sur la santé. Dre Claudel Pétrin-Desrosiers a souligné qu’il est primordial de reconnaître et promouvoir les bénéfices des milieux naturels et les effets sur notre santé physique, mentale et spirituelle et d’en parler à notre famille, nos amis et à nos gouvernements. Ayant grandi à Gesgapegiag, une communauté mi’kmaq en Gaspésie qui valorise les liens entre les humains et la nature sous toutes ses formes, Quentin Condo a suggéré d’établir la connexion avec la mer le plus tôt possible.
«Amenez les enfants à la plage. Il faut qu’il y ait un attachement pour valoriser quelque chose.»
– Quentin Condo
Un impact plus large
Au-delà des effets immédiats sur notre rythme cardiaque, le fleuve et les océans peuvent influencer notre santé de façon beaucoup plus vaste. En raison des changements climatiques, les océans se réchauffent, devenant plus acides et moins oxygénés, ce qui modifie les écosystèmes marins et réduit la quantité de produits de la mer qui sont pêchés pour notre consommation. Ceci peut affecter l’économie des pêches et la sécurité alimentaire, notamment des populations qui consomment ces produits pour couvrir une part substantielle de leurs besoins caloriques. La vallée du Saint-Laurent va également connaître une élévation du niveau de la mer et l’érosion côtière accrue dans les prochaines décennies, ce qui affectera certaines populations qui devront changer de lieu de résidence et peut-être d’emploi, avec tout le stress que ça implique.
C’est pourquoi il faut demeurer sur nos gardes quant aux projets qui pourraient être néfastes pour la santé de l’environnement et la santé humaine, a rappelé la Dre Pétrin-Desrosiers. Et pour être sensibilisé et avoir envie de changer de comportement, rien ne vaut la connaissance, particulièrement celle qui nous sort de nos habitudes. Dany Dumont a justement souligné l’importance d’aller à la rencontre de gens qui pensent différemment de nous et qui ont un lien fort avec la mer. Parmi eux : de nombreuses communautés autochtones, dont le savoir ancestral incluant des valeurs et une vision du monde plus holistique pourrait nous apprendre davantage à préserver des milieux naturels et à en tirer des bénéfices pour la santé.
« Pour nous, la santé et l’environnement, c’est indissociable. Quand j’ai les pieds dans l’eau pour pêcher, je vais chercher mon médicament pour être bien, pas juste de la bouffe. »
– Quentin Condo
Ressources
Pour regarder la discussion, rendez-vous sur la page Facebook de la Chaire Littoral : https://www.facebook.com/Littoral.Ulaval
Pour en savoir plus sur Quentin Condo, regarder ce court portrait vidéo produit par MAtv le 11 février 2020 : https://www.youtube.com/watch?v=Nu2uFyNe_dQ&ab_channel=MAtv
La titulaire de la Chaire de recherche Littoral est Mélanie Lemire. Mélanie Lemire est également professeure agrégée au Département de médecine sociale et préventive et titulaire de la Faculté de médecine de l’Université Laval et chercheuse de l’Axe Santé des populations et pratiques optimales en santé du Centre de recherche du CHU de Québec.
Pour en savoir plus sur l’Association québécoise des médecins pour l’environnement : https://www.facebook.com/aqme.environnement/
Pour en savoir plus sur le Réseau Québec Maritimes : http://rqm.quebec/fr/recherche-au-rqm/